Aujourd’hui, nous vivons dans la « société pluraliste ». Tous les points de vue sont admis et respectés. Cette liberté comporte un défi théologique pour nous, car elle pose une question fondamentale : où est la vérité ?
Les chrétiens sont d’accord que la création est une raison suffisante pour croire que Dieu existe, et cette vérité est confirmée par la résurrection du Christ, qui est également la preuve de la divinité du Fils de Dieu. Les apôtres ont été les témoins oculaires de la résurrection, et ils en ont été tellement convaincus qu’ils ont tous été prêts à dédier leur vie à annoncer cet événement et sa signification révolutionnaire pour l’homme. En différents temps et lieux, ils ont donné leur vie comme martyrs plutôt que de renier cette vérité, en des circonstances qui rendent invraisemblables les théories d’hystérie collective ou d’un événement mythique et seulement symbolique.
La difficulté apparaît quand nous nous demandons : « Quel est le vrai enseignement chrétien ? Y a-t-il une Eglise qui est vraie, et laquelle – ou bien aucune ? »
Je propose d’utiliser les méthodes et les arguments employés par les catholiques et par les protestants pour répondre à ces questions, en analysant leurs raisonnements face à la vérité historique. Nous verrons à quelles conclusions ceci nous amènera.
Les protestants veulent toujours citer la Bible. Nous allons la citer. Les catholiques s’appuient toujours sur le 16ème chapitre de l’Evangile selon Saint Matthieu. Prenons ce texte (Mt 16 : 15-19) :
Et Jésus leur dit : « Mais vous, qui dites-vous que je suis ? »
Alors Simon Pierre, prenant la parole, répondit : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant ! »
Reprenant la parole, Jésus lui déclara : « Heureux es-tu, Simon, fils de Jonas, car ce n’est pas la chair et le sang qui te l’ont révélé, mais mon Père qui est dans les cieux.
« Et moi je te dis que tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise, et contre elle ne prévaudront pas les portes de l’Enfer.
« Je te donnerai les clefs du royaume des cieux. Tout ce que tu lieras sur la terre sera lié dans les cieux, et tout ce que tu délieras sur la terre sera délié dans les cieux. »
Le verset 18 dit clairement que le Christ a fondé une Eglise, qui persévéra toujours. Il s’ensuit que les églises protestantes ne peuvent pas être cette Eglise, car elle est une, tandis qu’elles sont nombreuses, et n’ont pas été fondées par le Christ, mais par des hommes plus de quatorze siècles plus tard.
Quelles sont les caractéristiques de cette Eglise ? Saint Paul nous le dit dans sa Lettre aux Ephésiens (Eph 4 : 4-6) :
Il n’y a qu’un seul Corps et qu’un seul Esprit, comme il n’y a qu’une seule espérance au terme de l’appel que vous avez reçu ;
un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême,
un seul Dieu et Père de tous.
Il dit aussi (I Cor 12 : 12)
De même que notre corps ne forme qu’une seule unité, bien qu’il ait plusieurs membres, et que tous les membres ne forment qu’un seul corps, malgré leur pluralité, ainsi en est-il du Christ.
Nous pouvons conclure que cette Eglise est une, elle continue jusqu’aujourd’hui, et elle a l’unité de foi.
Les quelques 400 églises protestantes sont toutes convaincues d’avoir un enseignement juste, mais elles sont en contradiction les unes avec les autres. Cette absence d’unité de foi démontre qu’elles ne sont pas l’Eglise du Christ, à part le fait qu’elles n’ont pas été fondées par lui.
D’ailleurs, le Nouveau Testament auquel elles font toutes appel démontre ceci par son existence même. L’Eglise a existé avant que les premiers livres du Nouveau Testament fussent écrits. Ces livres ont été rédigés dans l’Eglise, par l’Eglise, et pour l’Eglise. Ce n’est que vers l’année 150 que le canon des livres entrant dans le Nouveau Testament a été établi – par l’Eglise. Il s’ensuit que sans l’Eglise fondée par Jésus-Christ il n’y aurait pas de Nouveau Testament, et donc que le Protestants se sont séparés de l’Eglise.
Les Eglises qui existent depuis le temps de Jésus-Christ jusqu’à aujourd’hui sont : l’Eglise Orthodoxe, l’église catholique de Rome, et les anciennes Eglises orientales. Ces dernières sont très proches de se réunir avec l’Eglise Orthodoxe après un constat de l’identité de leur foi avec celle de l’Eglise Orthodoxe. Pour simplifier notre tâche, nous allons poser la question : est-ce que l’église romaine est l’Eglise de Jésus-Christ ?
A première vue, cette église semble être bien qualifiée. Elle existe depuis le temps des apôtres, et elle se vante même d’être gouvernée par le successeur du principal d’entre eux. Elle interprète le passage que nous avons cité de l’Evangile de Saint Matthieu de la manière suivante :
le Christ a fondé son Eglise sur Pierre ;
Pierre était le premier évêque et le fondateur de l’église de Rome ;
il a transmis les privilèges qu’il a reçus du Christ à ses successeurs, le papes.
En vertu de cette théorie d’une primauté de droit divin, l’église romaine a déclaré au Concile Vatican I en 1870 que le pape de Rome a une juridiction universelle et immédiate, et qu’il est infaillible en matière de foi et de morale, de soi-même, et non pas du consensus de l’Eglise (ex sese, non autem ex consensu Ecclesiæ). Rome considère le Concile Vatican I comme œcuménique, et donc infaillible, bien que sa doctrine semblerait être en contradiction avec celle des VIème et VIIème Conciles Œcuméniques, acceptés par Rome eux aussi, et qui anathématisent comme hérétique et monothélite le pape de Rome Honorius.
Mais examinons les trois points de l’interprétation romaine de Matthieu 16 pour voir si celle-ci est effectivement la foi de l’Eglise dans les premiers siècles. Nous avons vu que c’est une condition pour l’Eglise du Christ que sa foi soit inchangée depuis le début.
(i) Aucun Père des premiers siècles n’a imaginé que le Christ ait fondé son Eglise sur Pierre. Saint Augustin (354 - 430), un Père très vénéré par l’Eglise l’Occident, le nie clairement quand il dit que Pierre aurait été une pierre bien chancelante, du moment qu’il a renié le Christ trois fois. Dans son ouvrage, Contre la lettre de l’hérétique Donat, il démontre que Petrus n’est pas petra (Pierre n’est pas la pierre) : « Il ne lui a pas été dit en effet : tu es petra, mais : Tu es Petrus. Or la petra était le Christ (I Cor 10 : 4) qu’a confessé Simon, comme toute l’Eglise le confesse : il a été dit Petrus ». Ainsi, si le Christ avait voulu dire qu’il fondait son Eglise sur Pierre, il aurait dit : « Tu es Pierre, et sur toi je fonde mon Eglise ». Dans son Sermon 76,1, Augustin précise sa pensée sur ce point : « Car la pierre est le Christ, et Pierre est le peuple chrétien. ‘Tu es’, dit-il, ‘Pierre’, et sur cette pierre que tu as reconnue en disant ‘Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant’, je construirai mon Eglise. Je te construirai sur Moi, et non Moi sur toi. » Ainsi, « cette pierre » signifie ce qui vient d’être dit : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant ». Voilà pourquoi Saint Cyprien de Carthage (c. 200 – 258), autre grand Père de l’Occident, dit dans son ouvrage De l’unité de l’Eglise : « Tout évêque siège sur le trône de Pierre ». D’ailleurs, on lit au verset 23 du même chapitre 16 de l’Evangile de Saint Matthieu que le Christ appelle Pierre « Satan », aussi à cause de ce qu’il vient de dire. Il n’est donc pas plus raisonnable de dire qu’il fonde son Eglise sur Pierre que de dire qu’il la fonde sur Satan.
(ii) L’évidence montre que Saint Pierre n’était jamais évêque à Rome, et qu’il n’a pas fondé cette église. D’une part, selon Saint Cyprien, les apôtres n’ont pas ordonné d’autres apôtres, mais des évêques, qui sont les successeurs de tous les apôtres, et ainsi tous sont les successeurs de Saint Pierre qui, lui, a fondé l’église d’Antioche (pourquoi donc les patriarches d’Antioche ne seraient-ils pas les successeurs de Saint Pierre au même titre que celui de Rome ?). D’autre part, il semble que Paul a fondé l’église de Rome, et a ordonné son premier évêque. Dans la lettre aux Romains il n’y a aucune mention de Saint Pierre. Il semble que la communauté y était très petite et pas encore formée. Saint Paul promet de venir bientôt pour évangéliser Rome (Rom 15 : 32). Ceci est confirmé par Saint Irénée de Lyon (IIème siècle) qui dit que Paul a ordonné les premiers deux évêques de Rome, Linus et Clétus, et que Pierre n’est venu à Rome que pour y mourir, durant l’épiscopat de Clétus. Il a ordonné Clément, qui est devenu le troisième évêque de Rome (voir Saint Irénée, c. 150 – c. 210, Contre les hérésies, livre 3, chapitre 3 ; comparez Saint Epiphane, Contre les hérésies ; Tertullien, Préscriptions, chapitre 32). Si Saint Irénée appelle Clémént le troisième évêque de Rome, c’est que Linus était le premier. Comment donc peut-on dire que les évêques de Rome sont les successeurs de Saint Pierre ?
(iii) Les prétendus privilèges de Pierre ont été donnés par le Christ à tous les apôtres après la Résurrection, et même avant : voir Mt 18 : 18 et Jn 20 : 22-23. Et nous avons vu que pour Saint Cyprien « tout évêque siège sur le trône de Pierre ». Mais il n’y a pas d’évidence que la primauté de Pierre parmi les apôtres était conçue en termes de juridiction ou de domination, et encore moins que Pierre l’aurait transmise à qui que ce fût. Le Christ dit :
Car le plus petit parmi vous, c’est celui-là qui est grand !(Lc 9 : 48)
Les rois des nations païennes leur commandent en maîtres, et ceux qui les dominent se font appeler Bienfaiteurs.(Lc 22 : 25-26)
Qu’il n’en soit pas ainsi parmi vous, mais que le plus grand parmi vous se comporte comme l’inférieur, et celui qui gouverne comme celui qui sert !
Si Saint Pierre avait eu le rôle de gouverner tous les évêques, il en aurait dit quelque chose dans ses lettres, que nous trouvons dans le Nouveau Testament. Au contraire, voici ce qu’il dit (I Pierre 5 : 2-3) :
Je vous exhorte à veiller en pasteurs sur le troupeau qui vous est confié, à prendre soin de lui non par contrainte, mais de bon gré, selon Dieu ; non pour un gain sordide, mais avec l’élan du cœur ;
Non pas en maîtres absolus de ceux qui vous sont échus en partage, mais en devenant les modèles du troupeau.
Comment réconcilier ceci avec les termes de la déclaration de Vatican I ?
Cette critique de la doctrine papale d’aujourd’hui est essentielle pour notre sujet, car si nous démontrons que l’Eglise de Rome a changé la foi des premiers siècles, nous verrons qu’elle ne pourra pas être l’Eglise du Christ.
Pourtant, tout ce que nous venons de voir dans les Saintes Ecritures et chez les Pères de l’Eglise correspond parfaitement avec la doctrine de l’Eglise Orthodoxe aujourd’hui. L’ecclésiologie des Eglises orientales séparées depuis le Concile de Chalcédoine (451) est exactement celle de l’Eglise orthodoxe, et ne comporte aucune trace de la doctrine papale. Ceci nous fait penser que tout le monde avait la même foi au Vème siècle, et que l’Eglise de Rome a changé depuis.
La dernière partie de notre investigation concerne le VIème siècle. A cette époque, Grégoire le Grand était pape de Rome. L’Eglise le vénère, et l’église romaine l’appelle « docteur de l’Eglise ». Nous possédons des lettres de lui, dont je citerai des extraits d’après l’édition bénédictine (catholique). Ces lettres concernent une controverse de ce pape avec Jean le Jeûneur, patriarche de Constantinople, auquel l’empereur avait donné le titre de « Patriarche œcuménique ». On a rendu ce titre en latin par universalis, et Grégoire ne connaissait pas le grec. Les protestations de Grégoire nous font connaître son sentiment au sujet de la domination de l’Eglise par un seul évêque.
De sa lettre à Jean le Jeûneur (lettre 25, livre 1) :
« Réfléchissez donc, que par cette présomption téméraire, la paix de l’Eglise entière est troublée, et que vous êtes ennemi de la grâce qui a été donnée à tous en commun. (…) Donc, très-cher frère, aimez l’humilité de tout votre cœur ; c’est elle qui maintient la concorde entre les frères, et qui conserve l’unité dans la sainte Eglise universelle. (…) Que direz-vous au Christ, qui est la tête de l’Eglise universelle, que lui direz-vous au dernier jugement, vous qui, par votre titre d’universel, voulez vous soumettre tous ses membres ? (…) Pierre, le premier des apôtres, et membre de l’Eglise sainte et universelle ; Paul, André, Jean, ne sont-ils pas les chefs de certains peuples ? et cependant tous sont membres sous un seul chef. (…) Ne sont-ils pas membres de l’Eglise ? et il n’en est aucun parmi eux qui ait voulu être universel (…).
« Votre Fraternité le sait, le vénérable concile de Chalcédoine n’a-t-il pas donné honorifiquement le titre d’universel aux évêques de ce siège apostolique dont je suis, par la volonté de Dieu, le serviteur ? Et cependant aucun n’a voulu permettre qu’on lui donnât ce titre ; aucun ne s’attribua ce titre téméraire, de peur qu’en s’attribuant un honneur particulier dans la dignité de l’épiscopat, il ne semblât la refuser à tous les Frères. (…)
« Le Seigneur dit à ses disciples : ‘(…) Ne vous faites pas appeler Pères, car vous n’avez qu’un Père.’ Que direz-vous donc, très-cher frère, au terrible jugement à venir, vous qui désirez non-seulement être appelé Père, mais Père universel du monde ? (…) Il est nécessaire, il est vrai, que les scandales arrivent ; mais pourtant, malheur à celui par qui le scandale arrive ! Par suite de votre titre criminel et plein d’orgueil, l’Eglise est divisée, et les cœurs de tous les frères sont scandalisés. (…)
« Si je ne recueille de ma correction que du mépris, il ne me restera que la ressource d’en appeler à l’Eglise. »
Voici maintenant des extraits de la lettre de Saint Grégoire à l’empereur (livre 5, lettre 20, édition bénédictine) :
« …Est-ce ma cause, très-pieux Seigneur, que je défends en cette circonstance ? Est-ce d’une injure particulière que je veux me venger ? Non, il s’agit de la cause de Dieu tout-puissant, de la cause de l’Eglise universelle. (…)
« Si quelqu’un usurpe dans l’Eglise un titre qui résume en lui tous les fidèles, l’Eglise universelle – ô blasphème ! – tombera donc avec lui, puisqu’il se fait appeler l’universel ! Que tous les chrétiens rejettent donc ce titre blasphématoire, ce titre qui enlève l’honneur sacerdotal à tous les prêtres dès qu’il est follement usurpé par un seul ! »
Après la mort de Jean le Jeûneur, son successeur Cyriaque continuait à utiliser le titre de Patriarche Œcuménique, traduit par universalis. Grégoire écrivit à ce sujet au patriarche d’Antioche (livre 7, lettre 27) :
« J’ai eu soin de lui faire connaître mon avis touchant ce titre superbe et superstitieux ; je lui ai dit qu’il ne pourrait avoir la paix avec nous s’il ne s’abstenait de prendre ce titre d’orgueil qui n’était qu’une invention du premier apostat. Vous ne devez pas considérer cette même affaire comme étant sans importance, parce que si nous la tolérons, nous corrompons la foi de toute l’Eglise. (…) Pour ne rien dire de l’injure qui est faite à votre dignité, on ne peut disconvenir que si un évêque est appelé universel, toute l’Eglise s’écroule si cet universel tombe… »
Dans une autre lettre à l’empéreur, Grégoire écrit (livre 7, lettre 33) :
« Moi je dis, sans la moindre hésitation, que quiconque s’appelle l’évêque universel ou désire ce titre est, par son orgueil, le Précurseur de l’antéchrist, parce qu’il prétend ainsi s’élever au-dessus des autres. L’erreur où il tombe vient d’un orgueil égal à celui de l’antéchrist parce que, de même que ce pervers voulut être regardé comme élevé au-dessus des autres hommes, ainsi, quiconque désire être appelé seul évêque s’élève au-dessus des autres. »
Dans une lettre à Euloge, patriarche d’Alexandre, il dit :
« J’ai dit que vous ne me devez pas plus donner ce titre à moi qu’à d’autres ; et voici que, dans la suscription de votre lettre, vous me donnez, à moi qui les ai proscrits, les titres orgueilleux d’universel et de pape ! Que Votre Douce Sainteté n’en agisse plus ainsi à l’avenir, le l’en prie ; car vous ôtez à vous-même ce que vous donnez de trop à un autre. (…) Si Votre Sainteté me dit pape universel, elle nie qu’elle soit elle-même ce que je serais tout entier. A Dieu ne plaise qu’il en soit ainsi ! Loin de nous des mots qui enflent la vanité et qui blessent la charité ! »
Tous ces extraits enseignent, dans la bouche d’un saint pape de Rome, que l’épiscopat est de dignité égale, et qu’il est diabolique de vouloir dominer les autres. Cet enseignement est celui de l’Eglise Orthodoxe, mais l’église romaine enseigne au sujet des papes exactement ce que Saint Grégoire condamne avec tant d’énergie.
Le patriarche Euloge d’Alexandrie adressa une lettre à Grégoire où il le flattait en l’appelant le successeur de Saint Pierre. Voici la réponse de Saint Grégoire (livre 7, lettre 39, édition bénédictine) :
« Votre Très-Douce Sainteté m’a beaucoup parlé dans sa lettre de la chaire de saint Pierre, prince des apôtres, disant que cet apôtre y vit encore lui-même dans ses successeurs. (…) J’ai accueilli volontiers tout ce que vous avez dit, parce que vos paroles touchant la chaire de Pierre venaient de celui qui occupe cette chaire de Pierre. (…) Quoiqu’il y ait de nombreux apôtres, le seul siège du prince des apôtres a prévalu par sa principauté, lequel siège existe en trois lieux ; car c’est lui qui a rendu glorieux le siège dans lequel il a daigné reposer (quiescere) et finir la vie présente. C’est lui qui a illustré le siège où il envoya l’évangéliste son disciple. C’est lui qui a affermi le siège sur lequel il s’est assis pendant sept ans, quoiqu’il dût le quitter. Donc, puisqu’il n’y a qu’un siège unique du même apôtre, et que trois évêques sont maintenant assis sur ce siège, par l’autorité divine, tout ce que j’entends dire de bien de vous, je me l’impute à moi-même. »
On doit remarquer que Saint Grégoire, en parlant de Rome, dit seulement que Saint Pierre s’y reposa et qu’il y mourut ; à Alexandrie il n’envoya que son disciple ; mais à Antioche il siégea sept ans. Si un évêque a hérité du siège de Pierre, dans la rigoureuse acceptation du mot, ce serait donc, d’après Saint Grégoire, celui d’Antioche.
Ainsi nous voyons que Saint Grégoire, pape de Rome au VIème siècle, était orthodoxe, et qu’il a fait exploser toutes les thèses papistes adoptées par ses successeurs – successeurs sur son siège, mais pas dans sa foi. Il dit clairement que la doctrine de Vatican I est celui de l’antéchrist ; l’église romaine a donc changé la foi de façon extrêmement grave.
En effet, la papauté a usurpé le rôle des trois Personnes de la Trinité : le pape prétend exercer la juridiction universelle et immédiate, qui appartient à Dieu le Père ; il se dit Vicaire du Christ, tandis que le Fils de Dieu n’a pas besoin de vicaire – il est ressuscité des morts, et il a dit : « voici que je suis avec vous tous les jours, jusqu’à la fin des siècles » (Mt 28 :20) ; il usurpe le rôle du Saint Esprit, qui est d’enseigner la vérité collégialement par tous les successeurs des apôtres, en se disant infaillible en questions de foi et de morale – tandis que le Christ a dit : « Le Consolateur, l’Esprit Saint, que le Père vous enverra en mon nom, vous enseignera toutes les choses et vous rappellera tout ce que je vous ai dit » (Jn 14 : 26).
En conclusion, nous avons vu que l’Eglise du Christ doit être fondée par le Christ, doit continuer jusqu’aujourd’hui, et doit avoir maintenu la même foi depuis les apôtres jusqu’à nos jours.
Les églises protestantes n’ont pas été fondées par le Christ, mais par des hommes et beaucoup plus tard, et elles sont en désaccord sur la foi entre elles et avec les Eglises apostoliques.
L’église de Rome propose un enseignement contraire à celui de l’Eglise des premiers siècles, comme en témoignent les Ecritures Saintes et les Pères, surtout Saint Grégoire le Grand, pape de Rome au VIème siècle.
L’Eglise Orthodoxe fut fondée par le Christ, elle existe de façon ininterrompue depuis lors jusqu’aujourd’hui, et elle a maintenu la même foi durant toute son existence.
Elle est donc la vraie Eglise de Jésus-Christ.
higoumène André (Wade), Alba Iulia, Transylvanie, 1996